Nous marchâmes en silence en direction de la boutique. En toute sincérité, je n’avais pas envie de penser à ce qui venait de se produire. Cela ne ferait qu’aggraver le malaise qui venait de s’installer, et je ne voulais pas ça. Néanmoins, il était difficile de s’enlever ça de la tête.

Je jetai un coup d’œil à mon amie. Elle paraissait affligée. Déçue ? Honteuse ?... Insultée ?

Je me mordis la lèvre inférieure, l’avais-je offensée ? J’espérais que non. La voir aussi nerveuse et triste me faisait déjà mal au cœur, s’il fallait en plus l’avoir blessée… mais j’avais réagi plutôt correctement, non ? À quoi s’attendait-elle en même temps… à ça peut-être justement, d’où sa nervosité quand elle m’en avait parlé.

Je fermai les paupières. Pourquoi devait-elle parler de ça ? Pourquoi ces deux hommes devaient se mêler de ce qui ne les regardait pas ? Sans eux, nous n’aurions qu’à angoisser à propos de meurtres et s’assassinats, pas d’histoires de cœur en plus !

Merry se mit à parler, me sortant de mes pensées moroses. D’un bref hochement de tête et d’un « Hum hum » j’approuvai sa demande. Puis, elle fit un commentaire.

Je m’arrêtai brusquement. Mes sourcils se froncèrent alors que je sentais une rage monter en moi. Sérieusement ? Sérieusement !? Elle osait plaisanter là-dessus !? Sur sa vie, comme si elle n’avait aucune importance !?

Je me retournai pour l’empoigner par les épaules. Mes yeux verts se plantèrent dans les siens, marron.

-Ce n’est pas un sujet sur lequel tu peux blaguer comme ça, Merry ! m’écriai-je avec colère, C’est un sujet sérieux ! On parle de ta vie, merde !

Je sentais mon sang bouillir. L’autorité que j’avais obtenue en tant que chef de garde commençait à apparaître. Je pris une grande respiration, valais mieux ne pas trop crier. Il y avait toujours des risques que quelqu’un nous entende et que ça nous retombe dessus plus tard.

-Merry, promets-moi. Promets-moi que tu feras attention et que tout se passera bien, que tu seras là quand je vais passer à l’auberge, bien portante et sans les soldats à ta recherche.

Mon ton avait baissé, ressemblant un peu à un grondement. Ma prise se resserra sur ses épaules, je ne la laisserai pas tant qu’elle n’aura pas promis. Ce serait qu’un mince soulagement, mais c’était mieux que rien.

Et, comme ça, elle aura de la pression supplémentaire.

-Tu n’aideras personne en étant morte. Les nôtres ont besoin de toi, j’ai besoin de toi !

Avec du recul, ce n’était peut-être pas la meilleure chose à dire avec ce qui s’était passé…

Oulha.. ouuulha. Mon visage restait sans expressions, mais je ne restait pas moins surprise de la réaction de Jehny quand à une "bête" vanne sans importance. Quoiqu'il en soit je l'écoutais sans chercher à analyser pourquoi elle réagissait de cette manière.

Oui, c'était bel est bien cette petite phrase qui l'avait gênée. Etrangement je me sentie idiote d'avoir dit ça, surement parce que la voir enervée ou presque ne me plaisait guère. Je sentais comme un petit remord s'installant en moi, elle s'inquiétait peut être trop. Presque j'eus moi même un court doute sur mes capacités, mais c'était ridicule de les remettre en question, rien ne semblait hors de ma portée pour une telle mission... mais tout de même...

Enfin, mon cœur se sentit piqué en plein sommeil. Il avait fait une surcharge de stresse il n'y a même pas une demi heure que les derniers mots de Jehny le réactivait tel un sort de foudre en pleine poitrine. Moi aussi ! C'était ce qui devait sortir de ma bouche, et pourtant les quelques secondes qui étaient en train de s'écouler semblaient durer une éternité.
M’humectant les lèvres plusieurs fois avant de parler, je la regardais difficilement cherchant un lieu de confort ou poser mes yeux. Ce fut sur son cou que mon regard se bloqua sans raison.  

- Oui tu as raisons, peut être qu'il faudrait arrêter les plaisanterie à ce sujet.

Rien d'autre n'arrivant, j'avais peur que la conversation ne se bloque à nouveau, c'est pourquoi dans un élan d'inspiration..

- Je ne sais pas pour les autres, mais je ne sais ni comment ni pourquoi mais moi aussi j'ai besoin de toi Jehny! Disais-je la voix étouffée par manque de respiration entre les mots.

J'espérais qu'on n'en revienne pas au statut quo de tout à l'heure. Peut être que les mots de Jehny avaient eu moins de sens que les miens, mais il ne faisait nul doutes qu'elle comprendrait le sens de ma phrase ... Idiote Merry.

A force de réfléchir et de me stresser toute seule, ma tête faisait mal et je sentais plus que jamais le soleil de Kireïde, dur et brûlant frapper sur mon crâne dur et aussi vide que celui d'une carpe aujourd'hui... Cette sentation immensément désagréable rendait la discussion toujours plus... ambigüe.

Bon sang, j'avais l'impression d'être en train de la tuer. Merry avait l'air d'être victime d'une violente et cruelle torture psychologie. Quoique, maintenant que j'y pensais, c'était peut-être exactement ça à ses yeux. Je pouvais même la sentir trembler entre mes doigts.

Dire que, entre une discussion de meurtre et une de sentiments amoureux, c'est cette dernière qui virait aussi mal. Merry ne me regardait même plus dans les yeux. Allions-nous pouvoir agir normalement après tout cela ? Je ne pouvais m'empêcher de douter, surtout si elle continuait d'insister.

Bon... elle venait d'admettre qu'il faudrait PEUT-ÊTRE qu'elle devrait arrêter de plaisantait en parlant de sa mort, surtout la sienne. Je n'allais pas me plaindre, c'était déjà une amélioration même si rien ne me prouvait qu'elle s'arrêterait dès que j'aurais le dos tourné. Le silence reprit sa place un petit moment après sa déclaration, j'attendais toujours qu'elle me promettre de s'en sortit. Au lieu de cela, mon amie répondit qu'elle avait aussi besoin de moi. Sauf que la signification n'était évidemment pas exactement la même, son ton était à un cheveux d'être désespéré. Un soupir franchit mes lèvres.

Je baissai la tête, laissant mes cheveux camoufler une bonne partie de mon visage. Ma prise ne se relâcha pas.

-Dans ce cas, promets-moi que tout se passera bien ce soir, dis-je d'un ton bien plus doux en relevant la tête.

Elle ne pourrait plus vraiment me voir si elle était six pieds sous terre, non ? Ô, giflez-moi. C'était à mon tour de faire des blagues douteuse sur ce sujet. Fréquentez des tueurs, ou j'ignorais commet qualifier Merry, ne nous mettait pas exactement devant la meilleure des influences.

Mes yeux s'écarquillèrent légèrement. Merry ne semblait pas dans son meilleur état depuis tout à l'heure, mais on dirait que ça empirait. Sa peau était pâle, en sueur, sa respiration semblait toujours difficile, ses yeux étaient légèrement vitreux... Mes doigts se resserrèrent autour de ses épaules, mais cette fois dans le but ne l'empêcher de tomber au cas où. Elle n'allait pas perdre connaissance dans mes bras, là ? Si j'étais cynique, j'aurais dit que ça lui ferrait plaisir.

-Merry ? Tout va bien ? Tu veux que j'aille chercher quelqu'un ?

Ma voix trahissait une certaine angoisse, il ne manquerait plus que ça. La boutique n'était plus très loin, nous pourrions aller chercher de l'aide là-bas si elle se sentait trop mal.